Ne craignez pas l’UBM

Dr Mario de La Torre

La biomicroscopie à ultrasons (Ultrasonic biomicroscopy, UBM) est une méthode supplémentaire de grande valeur pour le diagnostic de différentes pathologies du segment antérieur. A l’inverse de la tomographie à cohérence optique, l’UBM peut afficher des images des structures profondes du segment antérieur et de l’extrême périphérie de la rétine. Cette technique présente l’avantage d’être un examen dynamique, qui souvent ne nécessite pas la collaboration du patient, et qui peut être réalisé en présence d’un milieu opaque ou même quand la fixation du patient n’est pas très importante.

De nos jours, l’excellente résolution et pénétration obtenues avec les nouveaux équipements dotés de transducteurs plus puissants nous permettent d’avoir un nouvel outil d’aide au diagnostic accessible à tous. En ce sens, nous travaillons avec la nouvelle sonde 50 MHz du dispositif ABSolu, soit en utilisant le Clear-Scan ou la coque sclérale d’immersion.

Cependant, le fait qu’il s’agisse d’un examen « avec contact » réfrène de nombreux examinateurs à le pratiquer. Ce constat est vraiment surprenant alors même que toute personne réalisant des examens oculaires est amenée à devoir mettre en place soit un speculum entre les paupières ou une lentille à trois miroirs sur la cornée. 

Voici mon premier conseil : Ne craignez pas de réaliser un test avec contact, car ils ne sont ni plus ni moins compliqués que les autres tests en ophtalmologie.

La sécurité avant tout !

La première chose qu’il faut garder à l’esprit est que si l’examen est pratiqué avec un minimum de règles de sécurité, la procédure devient simple, inoffensive et rapide, avec d’excellents résultats.

Pour réaliser un examen sûr, nous devons nous assurer que le patient soit informé de l’examen réalisé et de la procédure suivie. Mon conseil est : « un patient informé est un patient qui collabore ». Le patient se présente à l’examen sans maquillage sur la peau des paupières ou sur les cils, et sans lentille de contact, si possible. Nous devons aussi nous assurer qu’il/elle ne souffre d’aucune forme d’allergies de contact, notamment aux anesthésiques, puisqu’un collyre va être appliqué localement afin de faciliter l’examen.

La prochaine étape est de définir si l’on utilise le ClearScan® ou une coque sclérale d’immersion car le transducteur doit être relativement éloigné des structures à examiner.

Le ClearScan® est un dispositif jetable qui nous permet de réaliser l’examen sur un patient en position assise.Il doit être rempli avec de l’eau distillée pour éviter la cristallisation des sels présents dans des solutions comme le BSS or le chlorure de sodium sur le cristal piézoélectrique. La tension de la membrane du ClearScan® doit être régulée en fonction de la sensibilité du patient et du type d’examen que nous souhaitons réaliser. Pour un examen de la cornée, des lésions sur les paupières ou pour des tumeurs superficielles, l’embout doit être très gonflé. Il doit présenter une certaine élasticité pour l’examen de l’angle et des autres structures rétro-iraniennes. Nous devons maintenir la turgescence seulement si nous voulons faire une pseudo-indentation avec le ClearScan®

Dans le cas de la coque sclérale à immersion, il est préférable d’en utiliser une en silicone à bords souples, qui aura été préalablement désinfectée avec des solutions adéquates puis rincée avec beaucoup d’eau avant de réaliser l’examen. Cela permet d’éviter une irritation causée par des substances extérieures. Cette coque sclérale sera placée doucement sur la conjonctive entourant le limbe, en évitant de toucher la cornée. Ensuite, elle sera remplie d'eau sans minéraux, en évitant l’eau distillée qui peut être dangereuse pour la cornée. 

Apprenez à connaitre votre patient

Un conseil important est de connaître la raison ou l’objectif de l’étude pour lequel ce patient nous a été envoyé, afin de savoir ce que nous devons rechercher. S’il s’agit de notre patient, il n’y a pas de problème. Mais souvent, des collègues nous envoient des patients pour exclure une pathologie spécifique, et cela doit être clairement indiqué dans l’ordonnance médicale avant de commencer l’examen. Ainsi, nous pouvons optimiser la recherche de la pathologie ou la corroborer dans le cadre d’une étude.

Standardisez vos examens

Nous recommandons toujours un examen ordonné et standardisé, d’abord par un « scan » à 360°, avec des mouvements oculaires du patient, en fonction de la zone que nous voulons examiner, puis se concentrer sur une zone où nous détectons une pathologie.

Un conseil important pour les débutants : cet examen est destiné à observer s’il y a quelque chose d’anormal dans le segment antérieur ou intermédiaire. Il est donc nécessaire d’avoir déjà examiné des yeux « normaux » pendant votre formation avant de s’aventurer dans la recherche d’une pathologie.

Le fait de « simplement » découvrir la présence d’une anomalie, quelle qu’elle soit, est important car il s’agit généralement de 50% du travail qui est réalisé.

Un autre conseil important : Décrire ce qui est anormal visuellement. Si vous ne parvenez pas à établir un diagnostic à première vue, ce n’est pas grave : celui qui lira votre compte-rendu et qui a plus d’expérience pourra ainsi déterminer le diagnostic en s’appuyant sur votre description. Ensuite, il est obligatoire que vous ayez connaissance du diagnostic final, afin de pouvoir corréler ce que vous avez observé avec la pathologie qui a été trouvée. Lors de ce processus d’apprentissage, il est essentiel que vous soyez accompagné par un tuteur ou mentor pour optimiser l’apprentissage.

Dans le processus d’apprentissage, il est absolument nécessaire de comparer vos conclusions avec d’autres méthodes, parfois même avec une pathologie, afin de corréler les lésions avec leur image en ultrasons.

 

En suivant tous ces conseils, nous pouvons commencer sans crainte à apprendre à pratiquer cette méthode qui va nous permettre d’accéder à des zones qui ne peuvent pas être atteintes par des méthodes optiques. De plus, le fait d’être un examen à operateur dépendant nous confère un rôle essentiel dans le processus de diagnostic, et nous pousse à nous améliorer chaque jour. Cette pratique nous implique à étudier, de manière plus enthousiaste, les pathologies et autres problèmes que nous allons découvrir au fil du temps.

Notre objectif est de dépasser la crainte de réaliser les premiers examens et avec beaucoup de patience et d’expérience, nous deviendrons des experts de cette fascinante méthode de diagnostic.

Mon dernier conseil, est d’étudier la pathologie macroscopique des lésions pour observer et corréler les observations cliniques avec vos conclusions. En effet, vous ne devez jamais oublier qu’il s’agit d’une méthode d’aide au diagnostic et que combinée avec les observations cliniques, elle vous donnera un avantage considérable sur vos collègues qui n’osent pas réaliser cet examen.